Vanité, vanité...

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J'ai reçu un mail. Heureusement, j'étais prévenue. 
Nous nous connaissons sans nous être jamais vues. Moi mieux qu'elle, je la connais par lui, je la devine sans lui, quoi de plus angoissant qu'un mystère. 
Un mail "pour comprendre". Dans un style théâtral. Posture de martyre. Qui s'avilit encore, en disant qu'elle s'avilit, immolée sur l'autel de la femme trompée, implorant celle par qui le malheur s'abat sur elle. Trompée avec une jeunesse, vingt ans dans la vue, trente kilos de moins, et le reste...
Me retrouve dans le rôle de la parfaite salope. La voleuse de mari. 
Oubliées les années où on se croise sans plus se voir ni se toucher. Oubliées les diputes, les rencoeurs, la séparation "pour motif de travail"... 
D'un côté la mère courage, de l'autre la petite pute.

Je me suis dit "mais comment peut-elle faire ça? m'écrire à moi, me tutoyer comme sa fille, sa copine, sa collègue, moi qu'elle n'a jamais vue? me mettre dans son linge sale"
Je me suis demandé si j'aurais pu faire ça, moi. J'ai pensé que non. 
Et puis j'ai pensé à un acte, dénué de tout autant de sens, bien similaire. Une autre époque, d'autres acteurs, un autre rôle pour moi. Pour se raccrocher, à lui, qui fuit, à ce qui traine, à ce qui reste encore accroché à lui, et qu'on essaie de saisir "pour comprendre". Un mail. Idiot. post-rupture. A une de ses ex devenue meilleure amie. La sienne. Parce que moi, elle ne m'aimait pas beaucoup. C'est même le parfait exemple de la litote. Je voulais la voir, boire un café. Comprendre. Garder un contact peut-être à travers elle. 

Parce que bien sûr tout n'est qu'un malentendu. Surtout quand l'autre prend les devants. Quand tout semble brutal. Obliées là aussi les portes qui claquent, les cris, les insomnies avec envie de le frapper lui qui ose dormir là à 10 cm, les angoisses avant chaque visites, les angoisses pendant chaque séjours, les pleurs... Rien que des malentendus. Il ne VEUT pas comprendre. Il m'abandonne alors que j'ai tout fait pour lui. Que j'ai été prête à tout lui sacrifier. Que j'ai fait tant de concessions. Que ces cris, ces pleurs, ne sont rien à côté de ce que je me suis tue, rien par rapport à ces quantités infinies de soufffrances muettes, rentrées, pour le satisfaire, pour "arranger les choses".

Je me suis revue, moi aussi, avec cette attitude de martyre. Stupide et pathétique masochisme de qui n'accepte pas d'être quittée alors qu'elle avait toutes les raisons de le faire, de ne pas avoir été la première. Un reste de pseudo fierté qui ne se dit pas. Vile, drapée dans une fausse bonté, de joue tendue bien chétienne, de ton sans acrimonie "pour comprendre". Je me suis reconnue dans cette fausse grandeur d'âme crasse, cette démonstration de souffrance dégoulinante, impudique et culpabilisatrice. Il y a toujours quelque chose de sincère dans cette comédie, parce que qu'on se la joue à soi-même pour se cacher sa propre laideur.

Publié dans Je suis nulle en amour

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